Dessiner une boîte à mouchoirs après exploration tactile

De quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’amorcer le dessin en 3D d’une boîte à mouchoirs (ou tout autre parallélépipède rectangle) en procédant d’abord par son exploration tactile.

Enjeux

– Passer d’une perception tactile du parallélépipède rectangle à sa représentation plane
– Socles 3.2.2.a : Associer un solide à sa représentation dans le plan et réciproquement
– Socles 3.2.3.b : Décrire les différentes étapes d’une construction en s’appuyant sur des propriétés de figures de transformations

De quoi a-t-on besoin ?

Pour chaque enfant, une boîte à mouchoirs, un bandeau pour les yeux, des feuilles vierges et de quoi dessiner

Comment s’y prendre ?

L’enseignant distribue un bandeau à chacun pour qu’il se cache les yeux. Ensuite il place dans leurs mains une boîte à mouchoirs en donnant la consigne suivante : «Vous recevez quelque chose dans vos mains. Ne dites pas à quel objet cela vous fait penser. Vous allez devoir le décrire comme si vous aviez affaire à un martien au téléphone : il ne vous voit pas et ne sait pas de quoi vous parlez ; il faut le lui décrire. Pour y arriver, je vais vous aider en posant des questions.»

L’activité se déroule suivant plusieurs étapes :
– Explorer tactilement puis dessiner sans le modèle sous les yeux
– Dessiner, avec le modèle sous les yeux, uniquement ce qui est visible
– Dessiner de façon à pouvoir reformer la boîte une fois le dessin découpé (comme un développement)

L’enseignant fait explorer la boîte en partant de la question : « Est-ce que cela peut rouler ? » et en demandant de préciser de plus en plus les réponses.
Les enfants interviennent oralement au fur et à mesure de leurs découvertes. Quand l’enseignant estime l’exploration terminée, il reprend les boîtes et propose aux enfants de dessiner ce qu’ils ont perçu.
La fin de chaque étape est l’occasion d’une mise en commun autour de l’exposition de productions. « Qu’est-ce qui fait qu’un dessin est apprécié comme étant bon ou pas ? Y a-t-il moyen de dessiner les 6 faces ? Quels sont les dessins qui permettraient de reformer la boîte ?… »

Échos d’une classe

1e étape

Les enfants sont occupés à explorer leur boîte.

– L’institutrice (I) : Je suis un martien et suis au téléphone. Donc je ne vois rien non plus. Alors décrivez cette boîte : est-ce qu’elle peut rouler ? Pourquoi ?

– L’élève (E) : Non, elle a des pointes et puis elle a des côtés tout plats.

– I : Combien de pointes ? Combien de côtés plats (on les appelle des faces) ? Quelle forme ont ces faces ?

Sans utiliser les yeux, les enfants ont tout vu : 8 pointes, 6 côtés, 2 grands, 2 moyens mais longs comme les grands et deux petits. Tous sont rectangles.

– I : Prenez tous les indices qu’il vous faut parce qu’il faudra dessiner cette boîte sans avoir le modèle devant vous.

Les enfants n’ont pas le modèle sous les yeux mais ils l’ont dans leur mémoire tactile. Dès le premier jet, il y a deux tendances dans les productions : soit l’élève a dessiné la face du dessus, soit il a tenté de dessiner le développement de la boîte à main levée, en attachant les différentes faces autour de la grande.

Dans certains dessins, on constate le respect des dimensions des arêtes verticales, ce qui permettrait de reformer la boîte si on le découpait. Souvent il manquait une face, celle du dessous. Certains ont tenu à ce qu’on sache qu’ils y avaient pensé en la faisant dépasser « timidement » de part et d’autre d’une des petites faces latérales.
La mise en commun des réalisations a révélé un net penchant pour les dessins où on ne voyait que la face du dessus : « Là, c’est une belle boîte. Sinon, les autres dessins, on dirait une boîte déchirée, aplatie ! »

2e étape

– I : Maintenant, vous avez la boîte devant vous. Ne dessinez que ce que vous voyez de cette boîte !

L’exposition des réalisations permet des commentaires judicieux : par exemple qu’un dessin ne respecte pas la consigne parce qu’on y voit la grande face et les deux petites sur les côtés… Voici ce qu’ils en disent :

– E : C’est impossible de voir les deux petites faces en même temps que la grande… Celui qui a dessiné ça n’a pas dessiné seulement ce qu’il pouvait voir. On peut voir trois faces, mais alors c’est une de chaque sorte.

– E : Ou bien, on peut voir seulement deux faces ou même une seule si on se met juste face à la boîte.

– E : En tout cas, on ne peut pas voir deux mêmes faces à la fois.

3e étape

– I : Parmi les premières productions, quelles sont celles qui vont nous permettre de reformer la boîte ?

– I : Allez-y, mais attention, n’oubliez aucune face !

– E : Ah, tu veux qu’on dessine le plan ?

Les productions montrent l’ingéniosité de beaucoup d’enfants qui ne savent pas trop où mettre la face du dessous ! Alors, on la fait juste un petit peu dépasser quelque part au bord d’une des faces latérales.

C’est le moment de défaire une de nos boîtes pour voir où se met cette fameuse face du dessous. Quant au problème des dimensions des faces latérales… comment faire « voir » dans l’espace ce qui est couché sur papier ? Comment mener l’autre face plus loin sans découper son dessin ? Comment faire prendre conscience de la hauteur de la boîte quand elle est toute plate sur la feuille ?

Un élève a trouvé les mots:

– E : Imagine que tu soulèves ta feuille par la grande face. Les autres faces vont “tomber” de chaque côté de cette grande. Regarde alors que si tu en as fait des pas assez profondes et des trop courtes, les coutures ne pourront pas tomber juste !

Cet élève arrive à se faire comprendre en mettant le dessin en mouvement de façon imaginaire.

Vers où cela va-t-il ?

– S’approprier le concept du rectangle.
– Ce qui suit relate la suite de l’activité « boîte à mouchoirs » telle qu’elle a été menée en classe.

Chaque enfant a devant lui une feuille avec différents polygones dessinés.

– I : Parmi toutes ces formes dessinées, sélectionnez celles qui sont rectangles.

Les enfants ont discriminé des rectangles parmi toutes sortes de polygones.

Un rectangle tout fin, tout long, est-ce vraiment un rectangle ? Finalement oui, il y a bien des garçons plus grands ou plus gros que d’autres et ce sont quand même toujours des garçons !

– I : Bon. Et le carré, est-ce un rectangle ?

– E : Eh bien non !

– I : Quelle est la différence entre un carré et un rectangle ?

– E : Le rectangle, il va toujours quelque part, parfois vers le haut, ou vers le bas, parfois vers la gauche, ou la droite. Tandis que le carré, il n’a pas d’endroit où aller, il est simplement là. Le carré, c’est comme un rectangle debout qui baisse la tête, on ne voit plus qu’il a une tête.

– I : Et quelle est la différence entre cette forme (le parallélogramme) et le rectangle ?

– E : Ils vont tous les deux quelque part, mais cette forme, c’est une caisse cassée, tandis que le rectangle, c’est pas une caisse cassée, c’est une caisse bien droite !

– I : Ça dépend de quoi qu’elle soit bien droite ou pas ?

– E : Ça dépend des coins. Ceux du rectangle sont bien droits comme ceux de la porte, de la fenêtre, du plafond, …

Avec un vocabulaire bien à eux, les enfants savent se faire comprendre !

Apprendre par des contre exemples, discriminer une forme par rapport à une autre, c’est mettre en évidence les propriétés de la forme en question en l’inscrivant dans un univers déjà plus global, comme dans l’apprentissages de la lecture où la lettre n’est rien si elle n’appartient pas à un mot, à une phrase, à un écrit plus vaste.

Ensuite, sur feuilles blanches ou quadrillées (des cm2 , des rectangles) au choix, on s’est amusé à faire une œuvre d’art rien qu’avec des rectangles.

Je n’ai pas trouvé nécessaire de favoriser ici l’utilisation de la latte. À main levée, les enfants ont pu réaliser l’ « idée » qu’ils se faisaient du rectangle, le concept. Tandis qu’avec la latte trop vite dans le circuit, il pouvait y avoir un obstacle d’arriver à faire une forme fermée, ou de tracer des côtés isométriques deux à deux,… À main levée, l’œil est plus enclin à trouver exact ce qui l’est approximativement.

– I : Quelle sorte de feuille pourra vous être la plus utile à l’avenir pour dessiner des rectangles ?

C’est ainsi que petit à petit, tous les enfants ont appris à tenir compte du support que proposait la feuille quadrillée et non la vierge.

Lors d’un autre temps de géométrie, nous avons d’abord fait à la peinture la trace des faces d’une boîte. On les a découpées puis les enfants ont été invités à venir prendre parmi un tas de faces de quoi réaliser une boîte bien droite avec des faces perpendiculaires, un parallélépipède rectangle.

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